Médecins généralistes orienter psys

Vers quels psys orienter un patient pour les médecins généralistes ?

1)   Vers quels psys, les médecins généralistes vont orienter un patient ? Dans quelles situations, cette orientation est nécessaire ?

Les médecins généralistes doivent orienter vers des psys avec une solide formation initiale : psychiatres et psychologues !

Comme nous l’avons vu précédemment, nous conseillons aux médecins généralistes d’orienter parmi les psys, soit vers des psychiatres, soit vers des psychologues. En effet, leur formation initiale garantit de solides compétences reconnues et légiférées par l’Etat. Ils peuvent par la suite avoir complété leur formation initiale par des spécialités diverses non réglementées par l’état (cognitivo-comportementalisme, hypno-thérapie, psychanalyse, sophrologie, systémie, intégrative, psychothérapies diverses…). A partir de maintenant, le terme « psy », ne fera référence qu’aux métiers de psychologue et de psychiatre.

La grande variété entre les psychologues et les psychiatres

Les médecins généralistes, avant de choisir vers quels psys orienter, doivent garder en tête la grande diversité qui existe parmi les corps des psychiatres et des psychologues :

1) selon les formations que les psys ont suivies

2) selon le ou les courants auxquels les psys se réfèrent

3) des psys qui travaillent en libéral mais aussi en hôpital/clinique (avec donc une meilleure compréhension du travail d’équipe et du parcours du soin) et d’autres qui ne sont qu’en libéral

4) des psys qui ont fait un travail sur eux-mêmes (une analyse pour ceux qui veulent devenir psychanalyste) et ceux qui n’en ont pas fait

5) les anciens psychiatres (formés au courant psychanalytique) et les nouveaux psychiatres (formés avec le DSM-V et au courant cognitivo-comportemental)

6) des psychiatres qui ne travaillent que sans médicaments et d’autres psychiatres qui ne travaillent qu’avec des médicaments

7) des psys spécialistes dans un domaine pointu et des psys plutôt généralistes

8) des psychologues spécialistes d’une période de la vie (bébé, enfant, adolescent, ou adulte) et des psychologues plutôt généralistes, pour qui le fonctionnement psychique de l’être humain est appréhendé comme la résultante d’un continuum d’étapes du développement franchies plus ou moins bien au cours de la vie

le choix des médecins généralistes d’orienter parmi tous les psys se déterminent en fonction de la maladie mentale ou des difficultés psychologiques rencontrées par le patient. La distinction entre mal de vivre, mal être social et maladie mentale est donc primordiale.

a)     Les situations qui nécessitent l’intervention d’un psychiatre

1) Quand un traitement médicamenteux est obligatoire, par exemple dans les cas de schizophrénie, de trouble bipolaire ou de psychose maniaco-dépressive (PMD), de paranoïa, de manie, de mélancolie, de démence chez les personnes âgées (alzheimer…), ou de bouffée délirante aigüe (BDA)…

2) Quand il y a un risque d’hospitalisation, par exemple dans les cas d’un risque suicidaire, d’une dépression chronique, d’une décompensation psychotique, d’un épisode maniaque ou mélancolique, ou d’un délire paranoïaque

3) Quand une hospitalisation est demandée par un tiers où il faut un certificat effectué par deux médecins

4) Quand on est en présence de troubles touchant à la fois l’organique et le psychique

5) Lorsque le patient présente une perte de repères de la réalité (discours incohérent, mélange de la réalité et de l’imaginaire, désorganisation spatio-temporelle)

6) Lors d’une atteinte psychologique mais le patient refuse de faire un travail d’introspection, et demande uniquement un traitement médicamenteux

7) Dans le cas d’automutilation (scarification)

8) Dans le cas de problème de dépendance (à l’alcool, aux drogues, aux vidéos…)

9) Lors d’une crise clastique (violence…)

b)    Les situations qui ne nécessitent pas forcément l’intervention d’un psychiatre et où le psychologue peut suffire

1) Quand le patient redoute le psychiatre (« Je ne suis pas fou !»).

La crainte d’être assimilé à un fou est la cause première et majoritaire pouvant dissuader une personne à consulter un psychiatre : c’est alors plus simple d’orienter dans un premier temps vers un psychologue (ref biblio ?).

2) Lors de difficultés personnelles telles que :

« Je me sens déprimé et mal dans ma peau. Certaines situations m’effraient. Je suis angoissé et tendu. On dirait que j’ai cessé de m’épanouir, j’ai le sentiment de régresser. Je dors mal. J’ai plus d’appétit. Je bois trop. Je ne sors plus de chez moi. », évoquant des signes annonciateurs d’une gravité possible si on ne les prend pas à temps, à vous de les détecter !

3) Lors d’une épreuve à surmonter (traumatisme psychique et choc post-traumatique) :

le patient peut avoir besoin d’aide pour traverser des évènements difficiles (deuil, maladie, perte d’un emploi, séparation, accident, attentat, agression, échec, ou harcèlement…).

4) Lors de difficultés dans les relations interpersonnelles :

« J’ai souvent l’impression que les gens ne m’aiment pas. Je suis toujours en conflit avec les autres. En plus, je ne sais comment faire pour les résoudre. Mal adapté dans mes relations avec autrui, je me sens isolé. Je suis jaloux de manière maladive. Enfin, j’ai le sentiment qu’on me veut du mal. »

5) Lorsqu’une décision est à prendre (guidance familiale/parentale/personnelle) :

« J’ai besoin d’en analyser les avantages et les inconvénients, pour me préparer aux conséquences de la décision, pour y voir plus clair. »

Ex 1 : « Je vais quitter leur mère, je sais que cela va les effondrer, je viens vous voir avant. »

Ex 2 : « Je suis un père divorcé qui veut aller habiter en Australie, quelles sont conséquences sur le lien avec mes enfants qui restent en France ? Comment faire au mieux ? »

6) Quand le patient souhaite vivre plus intensément :

« J’aimerais mieux me connaître, je ne suis pas malheureux mais je me demande si je ne passe pas à côté de quelque chose d’important, je souhaite enrichir ma vie et faire une démarche de croissance personnelle. »

7) Quand le patient souhaite réorienter sa vie avec la volonté de la changer ou de lui donner un nouveau sens :

« Je veux faire des changements dans ma vie ou ma carrière, je m’interroge et je ne sais pas comment m’y prendre, j’ai peur de ne pas faire le bon choix. Vers quels objectifs diriger ma carrière, ma vie ? »

8) En présence de difficultés d’un enfant/adolescent :

trouble du sommeil, intolérance à la frustration, colère, tristesse, perte d’appétit, difficultés scolaires, problèmes comportementaux, prises de risque, isolement, harcèlement, addiction aux réseaux sociaux, peurs, énurésie, encoprésie…

9) Lors de problèmes de couple ou de famille

disputes incessantes, manque de communication, panne de la vie intime…  enfant avec des problèmes, difficulté relationnelle entre parent et enfant, rupture avec la famille d’origine…

10) Lors de difficultés professionnelles

burn out, harcèlement, conflits au travail, surinvestissement professionnel…

c)     Les situations où le psychologue travaille nécessairement en alliance avec le médecin généraliste référent et/ou d’autres médecins spécialistes

1) Un psychotique en consultation (en alliance avec le psychiatre) : le psychologue constitue une digue chez le patient, pour lui permettre de préserver une partie saine de son psychisme. Il doit savoir se taire, repérer et contenir/colmater afin de ne pas faire décompenser le patient. Comme un chirurgien, on n’opère pas n’importe quelle affection, parfois, on referme sans toucher et on maintient le patient dans un pseudo équilibre.

2) Une dépression (en alliance avec le médecin généraliste et le psychiatre)

3) Un problème dermatologique (en alliance avec le médecin généraliste et le dermatologue) : eczéma, psoriasis, pelade…

4) Une énurésie ou encoprésie (en alliance avec le médecin généraliste, le gastroentérologue, et le neurologue)

5) Un risque suicidaire (en alliance avec le médecin généraliste, le pédiatre, et le psychiatre)

6) Une anorexie (en alliance avec le psychiatre, le médecin généraliste, et le diététicien)

7) Lors d’automutilation (en alliance avec le médecin généraliste et le psychiatre)

8) Un problème de dépendance au jeu, à l’alcool, ou aux drogues… (en alliance avec le médecin généraliste et le psychiatre)

9) Une phobie (en alliance avec le médecin généraliste et le psychiatre)

10) Un trouble obsessionnel (en alliance avec le médecin généraliste et le psychiatre)

11) Une sortie d’hospitalisation psychiatrique, qui est un moment à risque majeur (en alliance avec le médecin généraliste et le psychiatre)

Le psychologue renvoie toujours vers le médecin généraliste référent et c’est ce dernier qui oriente vers le spécialiste (sauf dans les cas de l’ophtalmologiste, du gynécologue et du psychiatre). Mais il nous revient à nous psychologues de restituer aux médecins généralistes les éléments cliniques pour les aider à mieux comprendre la dimension somatique.

d)    La spécificité des psychologues

– La passation des tests psychologiques au niveau cognitif

– Pour détecter un retard ou une précocité intellectuelle

– Pour soutenir une orientation scolaire

– En cas de difficultés dans les apprentissages

– La passation des tests psychologiques de personnalité

– Pour faire un état des lieux du fonctionnement psychique du patient

– Afin de comprendre l’origine des symptômes et des angoisses, et comment le patient pare à ses angoisses

– Dans le but de détecter les fragilités psychiques du patient (dont il n’a pas conscience) afin d’éviter une potentielle décompensation

– Pour permettre en psychothérapie de travailler au plus près des fragilités du patient afin de l’aider à en dépasser certaines

– Le travail psychologique auprès de personnes limitées intellectuellement (trisomie, handicap, dysharmonie cognitive…)

– La détection des appels à l’aide et du risque suicidaire. Lorsque le patient va voir un psychologue, il va plus naturellement lui exprimer son mal-être ; alors que chez le médecin généraliste son mal être s’exprime par le corps.

– La considération des syndromes, plutôt que des symptômes isolés. Ex : un patient qui est sur un mode maniaque, se dit ne pas être fatigué, alors qu’il n’a pas dormi depuis trois nuits et s’exprime de manière logorrhéique : ces deux symptômes sont des éléments annonciateurs d’une Bouffée Délirante Aigue (BDA). Les médecins vont avoir tendance à morceler les symptômes (sommeil, excitation due à une substance ?), mais ne pas voir pas une BDA arriver.

– La détection de la dyspraxie (maladresse pathologique dans les gestes à exécuter, dont l’étiologie n’est pas d’origine somatique)

– Du fait de leur expérience en institutions, une bonne capacité à

  • travailler en réseau, coordonner, discuter et dialoguer en synergie avec différentes professions (psychiatre, médecin généraliste, éducateur, professeur/enseignant, psychomotricien, orthophoniste, pédiatre…)
  • faire une synthèse et avoir une vision globale
  • savoir quand solliciter les grands hôpitaux pour une observation du patient, tout en passant par un médecin pour l’hospitalisation

e)     A garder en tête lors d’une potentielle orientation vers un psy

1) Quand le médecin généraliste oriente vers un psychiatre, il y a un risque que le psychiatre prenne la main sur le traitement, pas avec le psychologue.

2) Attention à vos propres projections vis-à-vis des patients (à traiter dans les groupes Balint) ! Un patient peut réveiller des expériences, des souvenirs, des émotions, des parents de votre vie et vous empêcher de voir de manière « neutre » la situation de votre patient. Quand vous en êtes conscient, vous pouvez arriver à vous contrôler. Mais si vous n’en êtes pas conscient, il y a des ratages (soit les patients ne reviennent plus, soit au contraire ils reviennent tous les jours). Cet écho en vous, va venir vous biaiser dans votre perception des patients. Il faut arriver à se décentrer de soi.

f)     Comment choisir une orientation plutôt vers une institution publique de santé mentale ou vers un psy en libéral/clinique privée ?

Dans ce choix, la question de la confiance du médecin généraliste en un professionnel de la santé mentale est fondamentale.

– Quand orienter vers un CMP (les Centres Médico-Psychologiques dépendent de la fonction publique, et sont pour la plupart sectorisés) ?

  1. Si une prise en charge pluridisciplinaire est nécessaire (psychiatre, infirmière, assistante sociale, psychologue, éducateur, orthophoniste, et/ou psychomotricité)
  2. Lorsque le patient a des moyens financiers limités
  3. Le patient a besoin d’être hospitalisé dans un service psychiatrique et si ce n’est pas urgent, car les délais en CMP sont longs (plusieurs mois). Il est difficile pour un médecin généraliste d’orienter directement vers un hôpital psychiatrique. Il doit faire appel à un psychiatre.

– En cas d’urgence (risque suicidaire, décompensation, crise clastique violente, bouffée délirante aigüe, ou épisode maniaque, etc…), comment orienter ?

  1. Si le patient a moins de 16 ans, il faut contacter les urgences pédiatriques de Robert-Debré (N= ?) ou de Necker (N= ?)
  2. Lorsque le patient est âgé de plus de 16 ans, il faut contacter le CPOA de Saint-Anne (01 45 65 81 09 / 10) ou l’Accueil des urgences psychiatriques de la Pitié-Salpêtrière (01 42 17 72 47)
  3. Dans le cas où le patient a déjà été suivi par un psy, il faut le prévenir
  4. Pour éviter l’hospitalisation lorsque c’est possible, ou quand le patient ne peut se déplacer, vous pouvez contacter SOS Psy Urgences (08 92 23 31 68) ou SOS Psychiatrie (01 47 07 24 24)

– Le cout et les délais, deux critères fondamentaux dans le choix d’orienter vers du publique ou du privé :

  1. Les longs délais pour accueillir un patient en hôpitaux publiques psychiatriques et en CMP, mais qui offrent des soins en grande partie remboursés
  2. VERSUS le coût plus conséquent des cliniques psy privées (mais mieux pour les dépressions car le patient ne côtoie pas les psychotiques) et des psy en libéral, mais qui peuvent recevoir rapidement le patient

Se pose alors la question éthique du remboursement. Nous pensons que c’est à la société de prendre en charge une maladie mentale. Quand le problème psychique relève d’un dysfonctionnement de la société, nous pensons que c’est à la société de payer pour que la personne aille mieux (attentat, harcèlement au travail, burn out…). Mais est-ce qu’une personne qui vient pour améliorer son bien-être doit répercuter le prix de son confort sur la société ?

3)    Comment les médecins généralistes accompagnent son patient à être orienter et prêt à consulter un psy ?

Avant d’orienter vers des psys, les médecins généralistes doivent s’assurer que certaines étapes soient franchies par le patient. D’abord, le patient prend conscience de sa souffrance, puis reconnaît qu’elle déborde ses capacités à y faire face, malgré les ressources mobilisées (personnelles et/ou sociales). Ensuite, le patient accepte qu’il a besoin d’aide et sait qu’une aide existe. Enfin il est d’accord pour se faire aider et précisément de recourir à une aide psy.

Les médecins généralistes eux aussi traversent un certain nombre d’étapes pour accompagner leurs patients à s’orienter vers des psys. D’abord, ils écoutent leurs patients et engagent le dialogue, car il n’est pas toujours facile pour les patients de parler spontanément de leur « vraie souffrance ».

Encourager les patients à parler de leur souffrance

En effet, les patients souffrant de détresse psychologique font souvent état de symptômes physiques tels que douleurs, nausée, difficultés sexuelles, problèmes de sommeil, fatigue, manque d’appétit ou perte de poids. De tels symptômes apparaissent comme un moyen permettant d’exprimer des détresses ou des troubles d’ordre psychologique. Ceci doit conduire les médecins généralistes à s’interroger sur le sens et la fonction des plaintes exprimées et médicalisées, et en particulier si leurs patients viennent fréquemment les consulter.

Les patients utilisent les plaintes somatiques comme ticket d’accès au système de soins et cherchent une solution rassurante lui évitant une étiquette stigmatisante encore aujourd’hui dans notre société d’avoir un problème d’ordre psychologique. De plus les mécanismes de déni, d’évitement et les rationalisations diverses du patient trouvent dans le corps médical des relais efficaces car la formation des médecins généralistes dans le domaine de la santé mentale est limitée.

Reconnaitre chez les patients leur souffrance psychique

Puis, les médecins généralistes reconnaissent la souffrance psychique de leurs patients, la nomme et la légitime. Ils peuvent alors expliquer à leurs patients qu’une aide est possible et leur montrer en quoi et de quelle façon cette aide est nécessaire. Pour cela, les médecins généralistes résument les causes de souffrances identifiées et pointent les limites des ressources personnelles, des actions entreprises ou des soutiens déjà présents. Ils complètent en leur expliquant ce qui peut être attendu de cette aide, en s’appuyant sur des exemples concrets.

Envisager une orientation de leurs patients vers des psys

Enfin les médecins généralistes discutent la possibilité d’orienter vers des psys pour obtenir l’accord de leurs patients. Ils présentent les différents psys existants, différencient le psychiatre du psychologue, et précisent au patient ce qui sous-tend l’orientation choisie. Ils évaluent le point de vue de leurs patients par rapport à ce soutien psy, leur intérêt, leurs craintes, leur incompréhension, et leurs réticences éventuelles. Les médecins généralistes alors clarifient pour leurs patients comment s’orienter vers des psys pourrait leur être utile et quelle est la spécificité de ce mode de prise en charge (diminution d’éventuels symptômes perçus par eux comme gênants, neutralité du psy…).

Le temps nécessaire de maturation du patient

Les patients ont besoin d’un temps de maturation avant d’être prêt à consulter un psy. Les médecins généralistes doivent donc patiemment accueillir leurs hésitations ou leur désaccord, et ne pas les presser. Ils analysent les réticences de leurs patients, accompagnent leur réflexion, leur proposent d’y réfléchir et de reprendre cette discussion ultérieurement. Les principales raisons données pour justifier leur refus de voir un psy sont : la crainte d’être assimiler à un fou, la minimisation de sa souffrance, le souhait de vouloir s’en sortir seul, l’absence d’utilité perçue dans un soutien psy, une mauvaise expérience passée avec un psy, des à priori sur les psys…

Accompagner leurs patients vers les psys

Quand un patient donne son accord, le médecin généraliste peut appeler le psy devant son patient pour prendre RDV et l’aider à y aller. « Est-ce que vous voulez que j’appelle le psy devant vous ? ». Dites au psy la souffrance du patient devant lui. Vous finissez l’échange téléphonique avec le psy avec un : « et Christine, vous me direz comme cela se passe ? ». Ainsi, vous montrerez ainsi au patient que vous êtes en lien avec le psy et qu’une alliance thérapeutique à trois se crée devant lui.

De plus, vous pouvez proposer au patient de dire ou d’écrire un mot au psy sur les difficultés et/ou l’histoire du patient, si cela soulage le patient de ne pas à avoir à le redire. « Voulez-vous que je le fasse ou vous le ferez tout seul ? ».

Il est important de toujours proposer le choix entre un homme ou une femme psy. Le patient souvent ne sait pas ce qu’il veut, mais parfois en fonction de ses symptômes ou de son histoire, il va avoir une nette préférence pour un homme ou pour une femme.

Aide pour les médecins généralistes sur comment accompagner cette orientation vers un psy selon le fonctionnement psychique du patient

Nous allons maintenant donner quelques pistes sur les bons arguments à utiliser en fonction du fonctionnement psychique des patients pour que le médecins généralistes les encouragent à s’orienter et à consulter des psys. Comme nous l’avons vu précédemment, il s’agit de lui pointer ses symptômes, les handicaps qu’ils produisent et ce qu’il « perd » avec ses symptômes. « Voilà ce que vous perdez et que vous ne pouvez plus faire, reconnaissez que là, cela ne va plus ! Prenez-vous en main, allez voir cette personne une ou deux fois, si cela ne marche pas, revenez me voir ». Les arguments pour convaincre vont donc dépendre de la structure psychique du patient.

a)     L’obsessionnel

C’est le cas le plus difficile à traiter : il est le champion de la résistance. Il dit qu’il veut se soigner, mais il ne le fait pas.

– Voici ses traits de caractère: sa vie est abordée sous l’effigie de règles, de la moral, et d’un cadre restrictif à observer ; il est atteint de la « maladie de la pensée ».

– Quel est le poids de ses symptômes ? Il réfléchit trop, ce qui le fatigue beaucoup. Par conséquence, il est atteint de neurasthénie (fatigue, l’anxiété, les maux de tête, la névralgie, une perte de joie de vivre et une diminution de l’activité) et de psychasthénie (indécision de l’esprit, s’accompagnant de doute de la personnalité, et se traduisant par des difficultés et une appréhension à agir).

– Comment le convaincre? « Vous n’avez pas toujours le bon raisonnement parce que vous réfléchissez trop à vos obsessions ce qui vous fait douter beaucoup. Forcément, vous êtes fatigué. Vous perdez en efficacité. Les autres s’éloignent de vous. Comme vous êtes courageux et têtu, vous avez toujours refusé de l’aide : vous avez essayé de résoudre vos problèmes tout seul, et ça ne marche pas. Cela va marcher avec un psy, parce que lui n’est pas en vous et ne se laissera pas emberlificoter par votre raisonnement. Il va percevoir ce que vous n’avez pas perçu et aller directement au but pour vous soulager. Vous qui avez le courage, osez ! ».

b)    Le phobique

– Son trait principal de caractère est la peur du conflit, ce qui entraine un évitement de situations et un enfermement social.

– Quel est le poids de ses symptômes ? Il faut jouer sur l’enfermement, et l’envahissement/contamination progressif de la peur dans tous les domaines de la vie du patient.

– Comment le convaincre ? « Vous êtes en train progressivement de vous enfermer chez vous, de vous priver de sortir avec vos amis, de vous vous éloigner de vos amis et famille. Vous avez peur de tout. A un moment, vous n’allez plus pouvoir travailler…».

c)     L’hystérique

Ce sont souvent des femmes, mais l’hystérie existe aussi chez l’homme.

– Son trait de caractère est la « maladie d’aimer ».

– Ses symptômes sont : la séduction, l’exagération, la théâtralisation, la recherche de l’amour avec un grand A sans jamais le trouver… Elle est dans une quête de se prouver qu’elle peut conquérir un homme, mais une fois qu’elle l’atteint, il ne l’intéresse plus et elle le fuit. L’homme est la représentation d’un fantôme paternel qui va continuer de lui dire : « Je sais que tu es la plus belle et tu vas me rendre le plus heureux». On n’est pas insensible à l’hystérique : soit on est agacé, soit débordé, ou séduit

– Quel est le poids de ses symptômes ? Elle ne trouve jamais l’amour, car elle l’idéalise.

– Comment la convaincre ? « Vous avez l’idée d’un amour idéalisé, vous devez revenir sur terre ». Pour montrer que vous êtes sensible à sa problématique : « Est-ce que vous préférez un homme ou une femme ? (elle va choisir l’homme) J’ai un collègue charmant, toutes les personnes que je lui envoie sont ravies, vous verrez…  »

d)    Le dépressif

Les dépressifs sont beaucoup plus nombreux que vous ne le pensez, car la dépression n’est pas toujours repérable (dépression masquée). Souvent, ils refusent les médicaments.

– Quel est le poids du symptôme ? Il souffre beaucoup, voit tout en noir, n’a plus d’envie et de plaisir, et dort mal.

– Comment le convaincre : « Je comprends parfaitement et c’est tout à votre honneur de tenter de résister par vous-même, et de refuser les médicaments. Sauf que cette souffrance, vous pouvez la soulager autrement qu’avec des médicaments. Vous ne savez pas pourquoi vous souffrez comme ça. Le fait de déverser à un psy, quelque chose que vous ne soupçonnez pas, va vous soulager. Il a la technique pour vous faire parler (moi je suis un spécialiste du corps), les mots vont venir. Faites-moi confiance, et allez vous faire du bien, comme je peux vous conseiller de faire du sport ou un massage… »

e)     Le psychotique

Nous parlons ici de psychose non décompensée et non diagnostiquée, et donc non soignée.

– Où sont-ils ? Dans la rue, en entreprise, à polytechnique, les grands laboratoires scientifiques, parmi nos relations, chez les politiques, un peu partout…

– Le travail du psy consiste à l’aider à trouver des astuces pour tenir dans la vie en solidifiant un bout de sa réalité pour lui éviter certains pièges du fait qu’il voit la réalité à travers un filtre et donc déformée. Je vous conseille de regarder le très bon film « un homme d’exception ». En effet il illustre la pathologie et décrivant la vie de John Nash, schizophrène qui finit par arriver à gérer ses hallucinations et terminera sa vie avec un prix Nobel.

– Idéalement il faut les envoyer chez les psychiatres, qui seront les envoyer chez un psychologue si nécessaire. Mais ce n’est pas facile car les psychotiques sont fuyants, et vont peu souvent chez les médecins car ils tombent rarement malades. C’est à traiter au cas par cas.

– Voici une astuce pour les convaincre: s’ils se plaignent de ne pas être suffisamment intelligents, vous les orientez chez un psychologue pour faire un bilan cognitif. Au décours du bilan intellectuel, le psychologue pourra faire un complément avec des tests de personnalité pour confirmer ou infirmer le diagnostic.

4)    Conclusion sur comment les médecins généralistes doivent orienter vers les psys

Les médecins généralistes au premier front des problèmes psychologiques de leurs patients

L’expression polymorphe et intriquée des troubles somatiques et psychiques trouve sa place dans l’approche polypathologique et polysymptomatique qui est la règle en médecine générale. Ainsi la place centrale du généraliste dans l’offre de soins en France devrait permettre de comprendre et d’optimiser toute intervention en santé mentale.

Et pourtant, les médecins généralistes restent très peu formés aux troubles psychiques. Ils semblent souvent démunis face à la multitude des modalités d’orientations existantes et à un « langage psy » incompréhensible. De plus, ils ont de moins en moins de temps à consacrer aux patients… et donc de temps à « écouter » les maux psychiques des patients, les symptômes somatiques prenant le devant de la scène de la consultation.

L’importance d’une collaboration entre médecins généralistes, psys pour la bonne santé des patients

Enfin ils se retrouvent souvent très isolés et insatisfaits de leur collaboration avec les psychiatres et les psychologues, lorsque ces derniers interviennent dans la prise en charge de leurs patients. Pourtant les bénéfices engendrés par des soins par une meilleure collaboration entre médecins généralistes, et psychiatres et psychologues sont nombreux… avec entre autre :

  • une amélioration des scores de la santé mentale
  • une amélioration des connaissances sur les troubles mentaux des médecins généralistes
  • une diminution de la durée d’hospitalisation en psychiatrie
  • une plus grande satisfaction des patients face à une meilleure prise en charge de leur santé.

J’espère que cet article permettra aux médecins généralistes de pouvoir plus facilement orienter des patients vers des psys. Les médecins généralistes sont un maillon crucial pour leurs patients, et pour aider leurs patients à s’orienter vers des psys pour qu’ils aillent mieux.

Si vous voulez plus de précisions contactez-moi!